Quand le sommeil l'emporte... [sujet libre]

Caméléon Nombre de messages : 70 Date d'inscription : 24/01/2007

Le jeune garçon observait la vitrine depuis déjà un long moment. Debout, immobile, les yeux rivés sur le chevalet exposé. Il était à peu près semblable à celui que lui avaient offert ses parents le jour de son seizième anniversaire. Il aurait bien aimé rentré dans le magasin afin de s’y acheter quelques matériels : des feuilles de papier A3, un crayon ordinaire ou un fusain, une boite d’aquarelle et des pinceaux… En fait, un simple crayon et un bloc de feuilles de dessins auraient suffit à le combler mais il n’avait pas un rond et savait bien que comme lorsqu’il avait voulut s’acheter une boite de biscuit, une pièce ne suffirait même pas à s’offrir un crayon.
Il restait donc là, languissant, silencieux à observer la vitrine jusqu’à ce que le vendeur sorte de son magasin pour le réprimander :

« Si tu n’as rien à acheter déguerpit ! Tu fais fuir la clientèle en restant planté là ! »

Léon baissa doucement la tête et s’excusa faiblement avant de s’éloigner lentement. Il ignorait qu’il était mal vu de s’attarder devant une vitrine de magasin mais il aimait tellement rêvasser ! Il s’imaginait dessiner la ville qu’il commençait à découvrir et puis surtout ses nouvelles connaissances, ses premières amies : Jaïleena et Mizuki. Le jeune Kemos s’adossa contre un mur et se laissa doucement glisser jusqu’à atteindre le sol. Une fois assis, sans redresser sa capuche qu’il gardait constamment pour dissimuler ses yeux changeants, il sortit de sa poche intérieure l’unique image qu’il lui restait de sa petite famille, le portrait qu’il en avait réalisé la veille de leur assassinat. Il l’observa longtemps en silence avant de le serrer tout contre lui tandis que le sommeil l’emportait et que la pluie s’annonçait…

Ca faisait un petit temps que Gabriel n'était plus revenu dans cette ville. Il n'y avait jamais séjourné longtemps mais il aimait bien y flâner. Malheureusement, ce soir, les nuages s'ammoncelaient dans le ciel, annonciateur d'une pluie abondante. Il n'avait pas envie d'être mouillé, ça lui donnait toujours une odeur épouvantable. Heureusement, sa chambre au logis était déjà payée, il n'avait pas à chercher un toit pour la nuit. Il pressa le pas, l'air préoccupé et manqua trébucher sur quelqu'un.

" Oups, pardon !"

Il se retourna en rougissant et se confondant en excuse devant le jeune homme qu'il avait percuté. C'était quelqu'un qui ne vivait pas dans le luxe et dont le seul trésor semblait être cette photo qu'il serrait contre sa poitrine, futile souvenir d'une vie qui ne serait plus jamais la sienne.

" Comment puis-je me faire pardonner ?"

Gabriel avait toujours eu le soucis de bien faire tout en ne se faisant pas d'ennemi, raison pour laquelle il se montrait zélé en excuses et très enclin à faire des petits plaisirs aux gens.

Caméléon Nombre de messages : 70 Date d'inscription : 24/01/2007

Le jeune garçon se saisit quand quelqu’un manqua de trébucher sur lui. Il se décrispa lorsque l’individu s’excusa : ouf ! Il ne semblait pas lui vouloir de mal. Léon comprit alors qu’il s’agissait d’un accident et qu’il ne l’avait absolument pas fais exprès, ce qui le rassura. Léon répondit doucement que ce n’était rien et que s’était de sa faute.
Il continuait de serrer son dessin contre lui. L’homme lui demanda ce qu’il pouvait faire pour se faire pardonner. Le jeune Kemos redressa lentement la tête et observa son interlocuteur d’un air interrogatoire.

« Je ne comprend pas… » dit-il doucement avant de demander pourquoi il devait se faire pardonner.

Quelques gouttelettes se mirent à tomber le jeune garçon leva les yeux au ciel et tendit doucement la main pour mieux sentir leur froidure sur sa paume.

« Il pleut. » conclut-il sans rien ajouter avant de ranger son dessin en sécurité sous sa veste avant que la pluie ne se fasse plus violente et ne l'abîme.

Pourtant, malgré le fait qu’il commence à pleuvoir le jeune garçon ne bougea pas : pour aller où ? Il n’avait nulle part où aller, il n’avait pas d’argent et ignorait comment en gagner… Soudain, Léon eût une idée et demanda au monsieur qui, lui, devait probablement en savoir plus que lui sur le monde et son fonctionnement comment on faisait pour gagner de l’argent.

Quel étrange jeune garçon... Il semblait complètement à l'ouest. Etait-ce la faim ? La fatigue ? Ou juste une profonde tristesse ? Il eut un sourire penaud devant sa première question.

" Je vous ai bouscullé, il faut que je rachète ma faute..."

Bon d'accord, il devait être l'un des seuls à prendre ça tellement à coeur mais c'était une habitude chez lui, il détestait s'attirer des ennuis. Il préférait prendre les devants.

" Zut !"

Les gouttes d'eau commençaient à tomber et il les sentait... Bientôt, l'orage redoublerait et il sentirait le renard mouillé pendant toute la soirée. Ce qu'il détestait porter cette odeur en plus ! Il devait se forcer pour les bains mais de prendre une douche gratuite dans la rue ne lui disait absolument rien. Il tendit une main à l'enfant.

" Viens, allons nous mettre à l'abri pour que tu puisses y réfléchir au sec."

Caméléon Nombre de messages : 70 Date d'inscription : 24/01/2007

S’était tout ? Il l’avait simplement bousculé par mégarde et il devait se faire pardonner ? Ce n’était pourtant pas si grave... Léon s’y perdait dans le raisonnement de son interlocuteur mais il se résigna à comprendre, à quoi cela l’aurait-il avancer de toute façon ? Une chose qui l’aurait certainement avancé était de savoir comment gagner de l’argent mais aussi de savoir comment s’en servir…

Le jeune homme lui tendit la main et lui proposa d’aller y réfléchir au sec. Comme toujours, Léon mit un certain temps à réagir. Il acquiesça doucement et tendit à son tour sa main au monsieur qui l’aida à se redresser. Une fois debout, le jeune Kemos vacilla légèrement et manqua de tomber, il se rattrapa au bras du jeune homme. Tout confus, Léon s’excusa. A vrai dire, le petit Kemos n’était pas réellement au mieux de sa forme, il avait les jambes en coton et la tête lui tournait. Pourtant il ne dit rien mais il n’était pas difficile de le deviner.
Lorsqu’il se sentit un peu plus sûr de lui, il lâcha le jeune homme.

« Pardon monsieur… » s’excusa-t-il encore, toujours tête baissée.

Bon, d'accord, quand il avait vu le garçon, il avait tout de suite su qu'il ne vivait pas dans le luxe et devait avoir besoin de quelque chose, qu'il était dans le besoin mais de là à ce qu'il s'effondre sur lui comme ça, il ne s'y attendait pas. C'était beaucoup plus grave qu'il ne le pensait. Depuis quand l'adolescent n'avait-il avalé la moindre miette de pain ? Quand avait-il bu une eau plus pure que celle de la pluie ? Quand avait-il glissé son corps malade dans des draps propres pour la dernière fois ?

" Viens, nous allons à l'auberge, si tu le veux bien..."

Là, il pourrait prendre soin de lui. Pas qu'il aie pitié au point de lui donner sa pitance... Non, il était un animal, il savait que donner indéfiniment ne servait à rien. S'il l'aidait cette fois, il le ferait jusqu'au bout ! Mais pas question d'en faire un molasson dépendant des autres. Il fallait découvrir comment l'employer. Son esprit fin de renard était déjà au travail...

Caméléon Nombre de messages : 70 Date d'inscription : 24/01/2007

Léon acquiesça d’un faible signe de tête, après un moment à la proposition du Kemos. Le jeune garçon avait du mal à tenir sur ses jambes et il faisait un effort considérable pour ne pas se laisser choir. La pluie se fit un peu plus intense et le Kemos releva la tête pour observer les gouttes qui tombaient du ciel. Les fraîches gouttes de la pluie qui s’écrasaient sur son pâle visage lui firent un peu de bien. Léon prit doucement la main de son interlocuteur. S’était une habitude chez lui de donner la main à quelqu’un, cela le rassurait et lui procurait un peu de réconfort. Il ne pensait jamais au fait que cet acte puisse gêner la personne à qui il tenait la main comme un enfant, à vrai dire une telle idée ne lui avait jamais traversé l’esprit.

Léon marchait lentement mais s’efforçait pourtant d’aller vite, il murmurait doucement les mots que lui répétait sa sœur lorsqu’elle voulait qu’il accélère et tienne le rythme : « Un, deux. Un, deux. Un, deux… »
Mais il était trop faible et finalement il s’écroula, essoufflé, les joues rosies par l’effort et par la fièvre.
Tremblant de froid et peut-être un peu de peur car il ne voulait pas fâcher le monsieur, le jeune Kemos ne cessait de murmurer des « pardon » à peine audible.

A l'auberge